jeudi 21 janvier 2010

The Lovely Bones (2009)

Vu hier à un des affreux astronefs Guzzo de la banlieue (le modestement nommé Méga-Spheretech de Terrebonne)...

Après la trilogie "Lord Of The Rings" (Le seigneur des anneaux) et son gargantuesque remake de "King Kong", Peter Jackson revient ici à un registre plus intimiste en adaptant le très discuté roman de Alice Sebold racontant l'histoire de Suzie Salmon (Saoirse Ronan), une jeune fillette de 13 ans qui, le soir du 6 décembre 1973, est violée puis assassinée par un homme apparemment normal mais désaxé, George Harvey (Stanley Tucci), voisin immédiat de la famille Salmon qui s'avère aussi un tueur en série notoire. Après sa mort, Suzie se retrouve au paradis, où elle observe à sa guise les déboires de sa famille qui peine à faire le deuil. Elle suit aussi les traces de son meurtrier, qui se prépare à faire une prochaine victime.

J'attendais le nouveau cru de Peter Jackson avec une certaine hâte, surtout sachant qu'il délaissait les gros canons pour un récit à caractère plus intimiste qui fait écho à son fabuleux Heavenly Creatures (1994), mêlant lui aussi d'étrange façon le merveilleux et le sordide. Cependant, c'est avec appréhension que je me suis présenté dans la salle hier après avoir lu quelques critiques et commentaires car disons-le, le dernier Peter Jackson est loin de faire l'unanimité, particulièrement auprès de ceux ayant lu le roman original d'Alice Sebold. Cela va de l'accueil tiède des critiques de cinéma aux commentaires pour le moins incendiaires, surtout auprès des internautes s'aventurant sur imdb. N'ayant pas lu moi-même le roman, je m'y suis donc aventuré en gardant l'esprit ouvert.

Je vais être honnête, j'ai trouvé l'ensemble plutôt sympathique. La mise en scène de Jackson est sans faille (lui qui retrouve ici son équipe habituelle) et le récit bénéficie de la fluidité de la réalisation et d'une reconstitution des premières années 1970 assez réussie. Il y a bien quelques bémols ici et là, Mark Wahlberg (qui joue le père Salmon), malgré de vaillants efforts pour insuffler un peu d'intensité à son personnage, n'arrive pas totalement à bien retransmettre tout le désespoir du père dépressif, tandis que Rachel Weisz ne fait pratiquement que passer dans le rôle de la mère (un personnage beaucoup plus présent dans le roman à ce que l'on m'a dit) et la grand-mère jouée par Susan Sarandon est réléguée ici à un rôle pûrement caricatural qui cause une rupture de ton mal venue dans l'ensemble, d'autant plus que cela vient d'une liberté prise par Jackson et ses co-scénaristes (Fran Walsh et Philippa Boyens) qui ont littéralement modifié l'essence même du personnage par rapport, encore une fois, au roman. Cependant, le principal défaut du film est de se complaire beaucoup trop dans les scènes paradisiaques où déambule la petite Suzie, et là Jackson met le paquet. Le problème, c'est que ces scènes sont parfois mal intégrées dans l'ensemble (problème de montage?) et si au début le résultat étonne (grâce à des effets visuels assez réussis), je me suis rendu compte à un certain moment que cela devenait lassant, jusqu'à casser quelque peu le rythme du film.

Cependant, les séquences "terriennes" où l'on suit le tragique destin de la fillette, la lourde traversée du désert de la famille endeuillée ainsi que le quotidien du sinistre meurtrier sont plutôt bien écrites et auraient gagné à être plus exploitées. Certains des détracteurs du film en veulent à Jackson d'avoir "édulcoré" le passage du meurtre de Suzie (qui, selon certains, était décrit beaucoup plus graphiquement dans le roman) et Jackson a lui-même avoué ne pas avoir voulu trop en montrer pour que son film puisse être vu par un jeune public. Alors que beaucoup accusent Jackson de s'être soumis à des intentions purement mercantiles et commerciales, de mon côté je suis d'avis que la décision de Jackson est plutôt bien justifiée, et il est bon de voir qu'en cette époque où le cinéma d'horreur gorgé de "gore" et de "torture porn" un cinéaste a eu enfin le culot de faire appel à la suggestion plutôt qu'à l'avalanche d'effets. Sans être graphique, la séquence du rapt et du meurtre de Suzie est particulièrement réussie et avec un minimum d'effets, tout en exploitant le pouvoir de la suggestion et du langage cinématographique, Jackson réussit à concocter une séquence très troublante et qui fait littéralement froid dans le dos. Certains peuvent toutefois déplorer que la dernier tiers du film prend les aspects d'un thriller (enquête policière, la traque du tueur par la soeur de la victime, etc.) et qui, malgré quelques séquences réussies où le suspense est bien mené, offre un contraste peut-être trop flagrant avec le reste de l'oeuvre.

Il reste à souligner l'excellente interprétation de la jeune Saoirse Ronan (Atonement) qui porte littéralement le film sur ses jeunes épaules, grâce une performance à la fois vivante et nuancée mêlant tout à la fois mystère et candeur, et rarement aura-t'on vu un regard aussi intense transpercer l'écran. Elle n'est pas en reste, car Stanley Tucci (The Road To Perdition) est particulièrement inquiétant dans la peau du sinistre voisin meurtrier, et il trouve là probablement le meilleur rôle de sa carrière.

Ainsi donc, sans être son meilleur cru, ce nouveau film de Peter Jackson reste tout de même une belle curiosité. Il me semble que la vendetta anti-Jackson lancée par les fans du roman original a teintée le film d'une réputation peu enviable qui ne me semble toutefois pas méritée. Mais bon, si vous l'avez-lu, approchez ce film avec soin. Vous êtes avertis !

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